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En examinant les ingrédients susceptibles de s’unir à l’amour et à la haine, je prends graduellement conscience d’un malheur qui affecte tous les systèmes de philosophie que le monde ait jamais connus. […] [I]l est toujours quelque phénomène plus rebelle qui ne se laisse pas ployer comme on le voudrait.

David Hume, Traité de la nature humaine, livre II, partie II, section VI

Hume est-il en train de concéder des lacunes de son système?

…non:

Mais comme les perceptions de l’esprit sont parfaitement connues, et comme j’ai usé de toute la prudence imaginable pour tirer mes conclusions à leur sujet, j’ai toujours souhaité me débarrasser des contradictions qui entachent les autres systèmes. En conséquence, la difficulté qui se présente n’est en aucune façon contraire à mon système; elle l’éloigne simplement quelque peu de la simplicité qui en faisait jusqu’alors la force principale et la beauté.

David Hume, Traité de la nature humaine, livre II, partie II, section VI

Hume est vaniteux (littéralement1): son système est le meilleur, soutient-il, parce que les données de la perception sont si certaines, et parce que les «lois» qu’il déduit sont si simples.

Le philosophe n’admet pas qu’il avait tort, recourant à des arguments naturalistes pour balayer de la main les contradictions apparentes de son système (qui seraient simplement des variantes compatibles, cohérentes avec son système):

La nature, qui a doté le corps de certains appétits et inclinations qu’elle accroît, diminue ou change en fonction de la situation des fluides et des solides, a procédé de même avec l’esprit.

David Hume, Traité de la nature humaine, livre II, partie II, section VI

Mais Hume s’est trompé: son système à quatre passions était trop beau (simple2) pour être vrai (complet).


  1. Hume est vaniteux, littéralement, dans ses propres mots: «Tout ce qui appartient au vaniteux est toujours ce qu’on peut trouver de mieux.» (#085). ↩︎

  2. Corollaire: la simplicité participe de la beauté d’une chose. ↩︎