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Il arrive que la compassion surgisse alors qu’elle n’est précédée ni d’estime ni d’amitié; la compassion est un malaise qui nous saisit lors de souffrances d’autrui. Il semble qu’elle jaillisse de la conception forte et intime de ses souffrances; notre imagination progressant de l’idée vive de la misère d’autrui à l’impression réelle de celle-ci.

David Hume, Dissertations sur les passions, section III, §4

La compassion n’est donc pas tant une question d’empathie que d’une affaire personnelle, qui concerne le Moi: le sentiment désagréable de ressentir la misère d’autrui telle qu’on la vivrait soi-même, selon soi-même.

La compassion serait donc, pour Hume, un mécanisme permettant de faire cesser cette souffrance transférée à soi-même (et non pour porter secours à autrui par bonté ou bienveillance).

Faire preuve de compassion étant un acte vertueux, c’est d’abord pour soi-même qu’on accomplit un tel geste, pour se faire sentir bien; d’autre part, cela est flatteur pour l’orgueil, puisqu’agir de façon vertueuse sous le regard des autres amène leur estime.

Quoi qu’il en soit, la compassion serait simplement affaire de satisfaction personnelle, c’est ce que Hume cherche à nous faire réaliser; il n’y a de gentillesse que pour ses propres fins; se donner à l’aimé n’est qu’un prétexte qui procure à l’aimant encore plus de plaisir (et qui suscite éventuellement la jalousie, comme nous le verrons).