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Afin de déterminer les causes de ces passions, nous devons réfléchir sur des principes qui, pour avoir une influence puissante sur toutes les opérations de l’entendement comme sur celles des passions, n’en sont pas moins ordinairement négligés par les philosophes.

David Hume, Dissertations sur les Passions, section II, §3

Dans ses interrogations préliminaires sur les passions, Hume cherche d’abord à en déterminer les causes, et plus précisément les principes de ces causes. Sa méthode, rappelons-le, est celle de l’empirisme, de l’expérience, de la simple observation.

Il relève ainsi trois principes qui décrivent le fonctionnement des passions:

  1. l’association des idées (on passe naturellement du coq à l’âne, pourvu qu’il y ait un quelconque lien entre les deux);
  2. l’association comparable des émotions (chagrin et déception sont souvent suivis de colère et d’envie, voire de malveillance, et à nouveau de chagrin);
  3. l’association entre deux émotions est d’autant plus forte lorsque les deux concourent à la même chose (une personne déjà en colère trouvera davantage de prétextes pour justifier son irritation chez d’autres personnes).

Ainsi un homme mis hors de lui et contrarié par un tort infligé par autrui est-il enclin à trouver une centaine de sujets de haine, de mécontentement, d’impatience, de crainte et autres passions inquiètes; surtout s’il peut les découvrir dans l’entourage de la personne, voire dans la personne même qui fut l’objet de sa première émotion. Les principes qui régissent la transition des idées concourent ici avec ceux qui agissent sur les passions; en unissant leur action, ils confèrent à l’esprit une double impulsion.

David Hume, Dissertations sur les Passions, section II, §3

Ces effets d’enchaînement remarqués par Hume fonctionnent par simple transitivité: une impression désagréable en entraîne une autre, similaire, tout aussi désagréable, comme le passage de la tristesse à la colère, puis à la haine et au ressentiment. C’est aussi vrai pour les émotions agréables: nous sommes plus généreux lorsque nous sommes d’emblée de bonne humeur, en voyant une personne que nous trouvons naturellement belle ou élégante, et notre propre bonté nous procure encore plus de bien-être.

Selon Hume, de telles relations, agréables ou désagréables, ont directement à voir avec des sentiments également binaires ou opposés, l’orgueil et l’humilité – lesquels sont primordiaux pour comprendre comment fonctionne l’amour.