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Journal

Qu’est-ce que le virtuel?

Dans son ouvrage de 1995 ainsi intitulé, Pierre Lévy propose de cerner ce concept, autour duquel subsiste une confusion généralisée:

Considérons pour commencer l’opposition facile et trompeuse entre réel et virtuel. Dans l’usage courant, le mot virtuel s’emploie souvent pour signifier la pure et simple absence d’existence […].

Cependant, Lévy nous avertit qu’«il ne s’agit nullement d’un monde faux ou imaginaire»; au contraire, le virtuel est un mode d’existence; il est simplement latent, en attendant que survienne son mode opposé, l’actuel.

La virtualisation est le processus permettant de problématiser le monde, d’en imaginer les possibilités encore inédites, de le reconfigurer, voire de le rêver afin qu’un jour il s’actualise.

La virtualisation est un des principaux vecteurs de la création de réalité.

(Pierre Lévy)

L’art et le langage sont des exemples de virtualisation par excellence.

Le morcellement technologique, souvent associé à la «dématérialisation» et à la «déterritorialisation» de l’économie (ce qui donne lieu à des métaphores chimériques comme celle de «nuage» en informatique), cristallise autant qu’il diffracte le concept de virtuel, qui n’est pourtant pas arrivé avec le numérique.

C’est peut-être parce qu’il multiplie nos rapports au réel – architectures distribuées, dispositifs simulationnels, environnements informationnels – que le virtuel nous déstabilise autant. Sa compréhension s’annonce plus critique que jamais pour saisir la complexité de notre monde:

L’architecture et le design fondamentaux de notre temps ne sont-ils pas ceux de l’hypercorps, de l’hypercortex, de la nouvelle économie des événements et de l’abondance, du fluctuant espace des savoirs?

(Pierre Lévy)