La pensée, activité purement idéale?
Dans un entretien réalisé en 2009, Jack Goody propose de considérer l’écriture comme une «technologie de l’intellect» ou «technique scripturaire» – ce qui suppose que les idées s’ancrent d’abord dans un ensemble de gestes, une technique.
C’est ce lien entre outillage de la pensée et manière de penser qui est en jeu dans la notion de technologie de l’intellect: l’écriture nous permet des opérations cognitives – faire des listes, des tableaux, réexaminer après-coup, etc. – qui nous donnent un surcroît d’efficacité intellectuelle, mais modifient aussi qualitativement notre compréhension du monde.
(Jack Goody)
Il souligne d’ailleurs l’importance du pouvoir (politique) des mots, qui sont au centre de «l’activité bureaucratique».
[…] l’écriture est une pièce centrale dans l’attirail du gouvernement
[…] l’écriture induit une structure sociale
Mais l’usage des mots est ambivalent, pouvant servir autant à des fins de domination que d’émancipation (savoir, c’est pouvoir):
Il n’en reste pas moins que la maîtrise de l’écriture émancipe. Dire qu’elle donne du pouvoir, ce n’est pas la réduire à un instrument d’oppression.
Le texte dit aussi:
Égalité des intelligences, différences d’outillage: voilà l’universalisme goodien.
Les outils. Le code. La transmission de la pensée.
Les mots ne sont pas innocents.